La Croisade une guerre sainte en terre chrétienne

Le catharisme, qui s’est répandu dans les terres des comtes de Toulouse et des Trencavel tout au long du XIIème siècle, touche en particulier la noblesse. Différentes actions, infructueuses, ont tenté d’endiguer ce mouvement : mission de Bernard de Clairvaux (le futur saint Bernard) en Albigeois et Toulousain, prêches de Dominique de Guzman (le futur saint Dominique), condamnation du concile de Lo

Les deux croisades

La croisade contre les albigeois comprend deux grandes phases. La première, de 1209 à 1223 est dite « Croisade des barons ». Le roi de France est alors Philippe Auguste. Il refuse de prendre la tête de cette expédition. Sans doute a-t-il plusieurs raisons. Il est encore en guerre contre Jean Sans Terre, roi d’Angleterre et contre l’empereur germanique Othon IV. Ouvrir un nouveau front ne semble pas prudent. Et puis, le pape est-il bien légitime à vouloir confisquer les fiefs de seigneurs dont il est le suzerain ? En 1223, Philippe-Auguste meurt alors qu’un concile se préparait à Paris pour négocier la paix en Languedoc. Le projet de paix est abandonné sous l’impulsion de Blanche de Castille, la femme de Louis VIII, mère du futur Louis IX. La croisade est relancée, elle est cette fois croisade royale, guerre de conquête.

Le siège de carcassonne- la Canso

Les récits de la croisade

De nombreux conflits antiques ou médiévaux ne nous sont connus que par la voix des vainqueurs. Ce n’est pas tout à fait le cas pour la Croisade contre les Albigeois. Quatre principaux chroniqueurs offrent des regards différents.

Pierre des Vaux-de-Cernay, moine cistercien et neveu de l’évêque de Carcassonne en 1212, est un témoin direct. Il est de parti pris, pro-catholique, mais son « Histoire albigeoise » écrite en 1218, est un témoignage important.

Guilhem de Tudèle, et son successeur anonyme, écrivent en occitan la précieuse « Canso ». Cette œuvre comporte deux parties bien distinctes : celle de Guilhem de Tudèle, plutôt favorable aux croisés, donc à l’Eglise, et celle d’un inconnu qui se place délibérément du côté du Comte de Toulouse et de ses alliés . La seconde partie de la « Canso » apparaît ainsi comme un puissant texte de contre-propagande au profit du camp toulousain. La copie manuscrite complète de la « Cançon de la Crozada » est conservée à la Bibliothèque nationale de France. Ce texte, redécouvert au XIXème siècle, fut baptisé par Frédéric Mistral la « Bible de notre nationalité ».

Enfin, Guillaume de Puylaurens dans sa Chronique apporte un regard plus tardif et plus juste bien qu’appartenant lui aussi au clergé catholique.

L’art de la guerre 

Les trois principales chroniques de la Croisade relatent 39 sièges. Les croisés conquièrent villes et gros bourgs, affrontent les places fortes de l’arrière-pays… tout cela exige des moyens imposants en hommes et en matériel.

L’utilisation de l’artillerie moderne, mangonneaux, pierrières, trébuchets… mobilise des combattants spécialisés et requiert une organisation sans faille. On fait par exemple venir de Paris l’archidiacre Guillaume pour construire les machines de guerre lors du siège de Termes en 1210…

Face à cette puissante et experte armée, les languedociens ont leurs montagnes, leurs murs, fossés, pieux, chemins de ronde. Ils tentent aussi des sorties hors les murs, toujours risquées.

La guerre est aussi psychologique, on cherche à impressionner l’adversaire. Les massacres, comme celui de Béziers où environ 20 000 personnes sont tuées en 1209 en font partie. Massacres, mais aussi bûchers, razzias pour détruire les culture, mutilation de prisonniers, feu grégeois…

L’après croisade

Des agglomérations nouvelles émergent après la Croisade. Dans quelques cas, cette mutation est due à une réorganisation décidée par les nouvelles autorités, lorsqu’elles estiment la proximité des habitats trop dangereuse. C’est le cas à Carcassonne, où l’on supprime les faubourgs en 1240 au profit d’une ville nouvelle, mais aussi à Limoux, à Termes, Cabaret et sans doute Saissac.

D’autres villages quittent les sites haut perchés pour se rapprocher des  terres cultivées et des cours d’eau. Dans le cas des bastides à plan régulier, l’économie prend le pas sur le militaire : la place du marché devient le pôle d’attraction, et l’habitat n’est plus subordonné à un château seigneurial.

Les seigneurs peuvent changer aussi. Certains ont été dépossédés : les « faidits », ces nobles occitans dont les biens ont été confisqués, ne retrouvent pas tous leurs biens à l’issue de la croisade. Des croisés ont pu les remplacer et faire souche. C’est le cas à Arques par exemple, avec la famille des Voisins, qui possède le château, mais s’offre une nouvelle résidence. Autre signe des temps…